Vagabond, intrépide et passionné, Christophe Coppens ne peut être rangé dans une seule case. “Artiste”, “styliste”, “metteur en scène” sont autant d’étiquettes qui ont jalonné son parcours professionnel avec plus ou moins d’intérêt. Mais ce qui est fascinant et unique chez lui, c’est que sa propre vie semble être un processus créatif continu et inépuisable.

En fait, se réinventer semble aussi naturel pour Christophe Coppens que de respirer, et il est rarement là où on l’attend. Actuellement installé à Bruxelles, il semble avoir trouvé dans l’opéra un moyen d’expression qui lui convient parfaitement. Il décrit d’ailleurs sa collaboration créative avec le Théâtre royal de La Monnaie comme une expérience unique et un immense privilège.

Cette année, il dévoilera sa vision idiosyncrasique de Turandot, l’une des œuvres les plus célèbres de Puccini. Au lieu d’utiliser des éléments historiques et familiers, il souhaite nous surprendre avec une interprétation moderne et une nouvelle vision audacieuse. Nous avons rencontré Christophe Coppens pour discuter de son parcours professionnel inhabituel, de sa passion pour les vêtements et de la raison pour laquelle l’opéra semble répondre à la plupart de ses besoins créatifs.

Pouvez-vous me parler de votre collaboration avec La Monnaie ?

C’est notre quatrième opéra ensemble. J’avais commencé à le préparer il y a quatre ans, mais, évidemment, la pandémie a tout retardé. Pour « Turandot », qui sera présenté à la mi-juin, je suis responsable de la mise en scène, des décors et des costumes.

Avez-vous parfois l’impression de faire cavalier seul, étant donné que vous travaillez simultanément sur plusieurs aspects clés de la production ?

Au contraire. L’opéra est un travail d’équipe, et j’ai la chance de pouvoir compter sur des personnes extraordinaires à La Monnaie. Les opéras sont des grandes productions qui impliquent énormément de préparation en amont. La Monnaie dispose de plusieurs ateliers avec leur savoir-faire et leur expertise respectifs. Tout peut y être préparé sur place, ce qui est vraiment très pratique. L’élaboration des costumes s’effectue comme dans une maison de couture, avec un atelier consacré au flou et un autre à la confection.

Vous avez acquis une renommée internationale en tant que modiste et vous avez également travaillé au sein d’un atelier à l’époque. Le format de l’atelier est-il important pour vous sur le plan créatif ?

Par le passé, j’ai travaillé sur des accessoires, des installations artistiques et des projets de décoration d’intérieur. Je vois en l’opéra un art multidisciplinaire, ce qui le rend particulièrement intéressant et complet à mes yeux. De par sa nature multidimensionnelle, l’opéra a en quelque sorte donné un nouveau sens à tout ce que j’avais fait par le passé. J’ai étudié le théâtre quand j’étais adolescent, alors d’une certaine manière, c’est un peu comme un retour aux sources.

Et c’est précisément cette approche holistique qui vous attire ?

Oui. Il faut constamment penser à de nombreux aspects et tout est lié.

Outre la confection d’accessoires, vous avez souvent travaillé avec des chanteurs ou des artistes sur des projets très spécifiques. Diriez-vous que la performance vous inspire ?

Exactement. Pour moi, la créativité et la performance artistique vont toujours de pair. Elle fait partie intégrante de mon processus créatif et constitue la base de mon travail. En fait, j’ai toujours été plus intéressé par le fait de transmettre un message par la mode que par sa dimension commerciale.

Vous êtes actuellement installé à Bruxelles, mais vous avez également vécu à Madrid et à Los Angeles. D’où vous vient ce besoin constant de voyager ?

C’est drôle, car avant mon retour à Bruxelles, l’un de mes amis m’avait prévenu que cela me ferait probablement bizarre de revenir dans mon pays natal après plusieurs années. Je n’ai pas vraiment l’impression d’avoir de point d’attache, même après toutes ces années. C’est une des raisons pour lesquelles je voyage beaucoup, mais cela me donne aussi une certaine liberté. J’aime l’idée de pouvoir tout mettre dans une valise et partir du jour au lendemain.

Avez-vous souvent eu l’impression d’être un outsider ? Vous êtes-vous déjà senti chez vous quelque part ?

J’ai toujours habité dans plusieurs mondes créatifs à la fois. Certains y voient une force ou une faiblesse, moi, je ne pourrais pas faire autrement. Pour l’instant, je suis heureux à Bruxelles.

Quel regard portez-vous sur l’industrie de la mode aujourd’hui et qu’en pensez-vous ?

C’est une question à laquelle il est très difficile de répondre, car malgré la commercialisation croissante de l’industrie, il y a aussi de jeunes créateurs qui travaillent de leur côté et qui ne veulent pas montrer leurs créations à Paris. Ils veulent simplement laisser libre cours à leur créativité tout en préservant leur travail. À force de pousser constamment les créateurs à vendre et à gagner toujours plus d’argent, ils en perdent leur créativité.

Quel rapport entretenez-vous avec les vêtements et le stylisme ?

Curieusement, je reste instinctivement attiré par les vêtements, et prendre un bout de tissu pour en faire un vêtement me semble tout à fait naturel.

Cela signifie-t-il que vous pourriez à nouveau travailler sur un projet en rapport avec la mode ?

Seul l’avenir nous le dira, mais je n’exclus pas cette possibilité.