Bureaux, retail et collectivités n’ont presque aucun secret pour Jonathan Honvoh et Rodrigue Strouwen. Ils ont choisi Liège, où ils se sont formés, pour concrétiser leur aventure avec tout l’audace qui les caractérisent. Chaque challenge est une occasion de se surpasser pour ce duo d’experts dans leurs domaines.
Vous êtes co-fondateurs et associés de Twodesigners. Comment avez-vous débuté ensemble ?
Notre premier voyage en Erasmus à Turin nous a rapprochés durant nos études respectives en design industriel à Saint-Luc Liège. S’ouvrir à la création dans un autre pays que la Belgique nous a permis de découvrir notre complémentarité dans une variété de disciplines, et notre plaisir à travailler ensemble au service de projets ambitieux et réalistes. En 2011 nous fondions Twodesigners.
Belgium is Design vous a d’abord présenté au Salon Satellite à Milan. Que s’est-il passé ensuite ?
Nous avions envoyé notre candidature pour participer à ce salon important pour les jeunes designers et on a finalement eu l’opportunité d’y participer puis de réaliser les bureaux de Wallonie Design.
Comment avez-vous évolué de « jeunes designers » à « studio d’architecture intérieure » ?
A nos débuts, nous nous sommes concentrés sur une production de petit mobilier. Nous avons présenté le projet Kork en 2012 : des tables aux plateaux conçus en liège. Ces designs offrant une alternative plausible à l’usage de matériaux plastiques ont tapé dans l’œil de l’éditeur belge Linadura, qui les a déclinés en une ligne de rangements modulaires. Cependant, nous trouvions que l’édition avait une finalité élitiste et que peu de gens profitaient réellement de nos objets au quotidien. Pour ainsi dire, produire une énième chaise ne nous intéressait pas. Nous nous sommes donc spécialisés dans le concept et l’aménagement d’intérieurs sur-mesure ; les problématiques y sont en prise directe avec les besoins du commanditaire et ceux de l’usager final.
De quelle équipe êtes-vous entourés ?
Nous sommes maintenant directeurs de création au sein de Twodesigners qui comprend deux architectes, un architecte d’intérieur et un graphiste. Faire grandir notre équipe au fil de nos projets nous a permis de nous affirmer et de nous définir en tant qu’agence. Notre dynamique de travail est commune : ce sont nos passions, notre savoir-faire et nos convictions qui nous permettent de mener à bien la réalisation d’un projet.
Vous qui chérissez l’hybridité. Comment cela se traduit-il en pratique ?
Chaque membre de notre équipe apporte sa propre expérience afin d’appréhender les projets avec une vision nouvelle. Aussi, nous demandons aux ateliers de fabrication et aux différents corps de métier avec lesquels nous travaillons d’expérimenter.
Quelles sont aujourd’hui les spécificités de Twodesigners ?
Dès nos premières réalisations en groupe, nous savions que notre double expertise, dans le graphisme et dans la conception de meubles, pouvait devenir une arme à double tranchant. Ainsi, faire du beau pour du beau ne nous a jamais intéressé. Nous nous sommes toujours appliqués à créer des objets, des espaces de qualité, qui peuvent être utilisés ou rester en place longtemps. Pour résumer, nous sommes donc un studio de design et d’aménagement d’intérieurs publics, d’hôtels et de restaurants et de magasins innovants et qui osent pleinement être contemporains. Nous proposons aussi des services d’accompagnement au développement de l’identité pour des petites et moyennes entreprises.
Quel est votre modus operandi ?
Nous n’avons pas de prédilection pour le choix des projets. Nos clients nous contactent car ils ne cherchent justement pas à imposer une signature Twodesigners à leur environnement mais avoir un espace accueillant et chaleureux, positif, qui leur ressemble et qui est surtout humain. La fonctionnalité et le ressenti que l’utilisateur a de l’espace priment dans nos réalisations. Nous croyons que chaque client est unique et mérite un lieu qui lui soit propre. Ce sont leur personnalité et leurs objectifs qui déterminent nos traits, du dessin à l’architecture finie.
Quel mot employerez-vous pour imager votre signature ?
Vivant.
Quel regard portez-vous sur l’évolution du design et de l’architecture intérieure dans les secteurs professionnels que vous touchez ?
La modularité est désormais presque une règle, alors qu’il s’agissait d’une curiosité auparavant. Aussi, les acronymes désignant les tendances en aménagement d’espaces professionnels, comme le New Way Of Working (NWOW), tout comme les certifications vertes, pullulent dans l’immobilier d’entreprise. Les plus perméables sont les bureaux où de nombreuses guidelines imposées par les constructeurs sont désormais à respecter afin de limiter l’empreinte carbone des bâtiments, ou de séduire les jeunes générations pour favoriser le retour au bureau. Cela peut être une bonne chose mais il faut faire la différence entre les firmes qui cèdent complément aux sirènes du marketing, celles les moyens d’appliquer ces normes, celles qui le font avec justesse, et des jeunes entreprises ou des sociétés à taille humaine pour qui l’optimisation à tout-va peut être contreproductive. On doit évoluer, mais on ne peut pas dire imposer n’importe quoi à toutes les catégories d’usagers.
Qu’est-ce que la durabilité selon vous ?
Tout, sauf du greenwashing ! Certains de nos clients arrivent parfois avec l’envie pressante que leurs intérieurs soient « instagrammables ». Nous leur proposons plutôt de travailler dans l’objectif qu’ils puissent demeurer dans la durée. On essaie ainsi souvent de rendre les client plus sensibles aux prorités d’aujourd’hui : un espace élégant et agréable à vivre certes, mais qui puisse réutiliser du mobilier usagé ou est ou qui est conçu avec des artisans locaux à Lièges, Namur ou au Luxembourg, pour réduire l’impact écologique de conception.
Que considérez-vous comme vos réalisations emblématiques à Liège ?
Le coworking d’entrepreneurs et créatifs La Grande Poste, qui totalise 8 000 mètres carrés, et son rooftop, assurément. Ceux-ci nous ont beaucoup appris en termes de mixité et de diversité d’environnements. Aussi, avoir une vision à 360° pour l’aménagement du restaurant ¡Toma! du chef belge Thomas Troupin, auréolé d’une étoile au guide Michelin, nous a conforté dans le fait que nous soyons à l’aise dans le milieu de la gastronomie, ce qui nous a récemment mener à réaliser l’hôtel et la table des chefs David Martin et Mathieu Van de Velde en région liégeoise : Le Roannay.
Quels conseils donneriez-vous à ceux et celles qui entament une formation de designer, de graphiste ou d’architecte ?
Avoir du recul, embrasser la diversité, mélanger les univers et savoir s’affranchir des règles, casser les codes. Pas besoin d’attendre de devenir expert dans son domaine pour faire cela. Il faut savoir suivre ses intuitions, rester bien entouré et toujours créer dans l’écoute et le respect d’autrui.